Quand je sens que mon corps ne peut plus limiter ma pensée, je deviens un concepteur de jeux.
Ma pensée ne suit pas toujours le temps du passé vers le futur, parfois elle se plonge dans les souvenirs du passé, parfois elle fantasme que le futur est déjà arrivé sur moi. Mes émotions peuvent passer de la joie à la tristesse, mon âme peut aussi passer de l’errance à la détermination.
Quand je joue à des jeux, ma pensée perd souvent le contact avec moi, et quand je conçois des jeux, mon corps oublie parfois son existence. Je ne sais pas si c’est une évolution ou une régression, peut-être que quand ma pensée et mon corps se disputent, je ferai un choix.
Chaque fois que je sors de chez moi, mon corps devient si insignifiant dans ce monde, comme un grain de sable dans l’océan, alors ma pensée me dit que je devrais aller là où je dois aller. Je n’aime pas errer sans but, je n’aime pas cuisiner, je n’aime même pas les conversations inutiles, car je pense que cela détournerait ma pensée de sa trajectoire.
Et quand je reste seul dans une pièce de dix ou vingt mètres carrés, ma pensée jaillit et remplit tout l’espace, puis crée un monde plus grand, qui s’étend à l’infini, ou qui pénètre dans le monde microscopique, explorant attentivement toute trace. Parfois je suis comme un créateur, qui surplombe le monde entier, à ce moment-là, un caillou ou le démon qui détruit le monde dans ce monde ne peut pas attirer mon attention davantage, ils sont égaux dans ma pensée, ils font partie de mon monde. Parfois je suis comme une goutte d’eau, qui cherche une fissure sur le mur épais de la ville, qui dénoue les fils et cherche un chemin inimaginé.
Quand j’apprécie de réfléchir seul dans la nuit tranquille, je deviens un concepteur de jeux.
Peu à peu, j’apprécie davantage l’expérience que le monde m’apporte, qu’il s’agisse du monde réel ou du monde que j’imagine. Qu’il s’agisse de l’ouïe, du goût, de la vue, du toucher ou de l’odorat, ils peuvent tous me faire plonger dans le plaisir qu’ils procurent. Mes émotions sont plus profondes, je deviens plus susceptible de changer d’humeur à cause de petites choses insignifiantes, tout influence mon être comme si c’était naturel. Lentement, je deviens quelqu’un qui n’est plus ordinaire.
Je poursuis sans cesse l’odeur que j’aime et que j’ai sentie par hasard, j’analyse sans cesse les ingrédients et les procédés qui doivent composer le plat que j’aime manger, la mélodie qui m’a touché résonne sans cesse dans ma tête. Je suis une personne conservatrice, je profite longtemps du plaisir que je poursuis, mais je suis aussi une personne insatisfaite du statu quo, je reconstruis sans cesse mon monde.
J’ai toujours cru que ma pensée n’est pas limitée à cela, mais elle n’est pas encore assez bonne, elle ne sera jamais assez bonne, du moins pendant ma vie. Je suis fidèle à mes idées intérieures, je ne vais pas plaire à quiconque contre ma volonté. Je suis un individu unique dans ce monde, je suis aussi un dieu unique dans mon monde, je n’attends pas que les autres suivent mon rythme.
Dans la ville aux gratte-ciel nombreux, la lune ne peut plus pénétrer l’âme humaine. Les humains ont construit des murs d’acier autour de leur cœur en même temps qu’ils ont vendu leur âme au désir faible. La mort n’est pas la fin. Perdre sa pensée est la fin de la vie. Les gens apprécient la chaleur de la famille. Cela existe souvent dans les souvenirs après avoir perdu quelque chose. Mais nous ne perdons pas nécessairement la famille. Les gens de l’année sont toujours là, et ce qui n’est pas là, c’est le moi ignorant de l’année. Nous perdons notre moi, que ce soit le moi ignorant de la jeunesse ou le moi qui n’a jamais été perdu dans la société des adultes.
Je me souviendrai du passé dans mon monde, je m’excuserai auprès du monde passé, je ne suis plus le moi d’alors, et je n’ai jamais été la personne que le moi d’alors aspirait à être.
Quand j’ai grandi, je suis devenu un concepteur de jeux.