Retour en arrière fin 2023 : dernière année d'études, je me fais chier comme un rat mort et je n'ai pas ma tour pour jouer à des jeux, je n'ai qu'un PC portable un peu claqué. Par manque de sous, je me tourne vers des moyens douteux pour jouer à de nouveaux jeux que mon ordi fera tourner. Et un jeu capte mon attention : SIGNALIS. Au début, j'en chope une copie moyennement convaincu, même si j'adore les survival-horror de l'époque PS1-PS2 dont le jeu s'inspire énormément. Alors, un soir, tel un vrai nerd, plutôt que de sortir boire des coups avec mes collègues de promo, je lance SIGNALIS. Et là, dès le moment où le titre tombe, et que je finis l'intro, je sais que ce jeu va être différent. Et bordel, j'avais vu juste.
C'est simple, j'ai dû le finir en octobre ou en novembre, et aujourd'hui, plus de 6 mois après, pas une journée ne passe sans que je ne pense à ce jeu. Que ce soit la musique, les graphismes, l'histoire, l'ambiance, le gameplay, tout ce qui compose ce jeu a réussi à s'infiltrer à travers la couche imperméable de stoïcisme qui me constitue. Mais si, vous savez, ce sentiment que les jeux auxquels vous jouez n'ont pas le goût, la saveur d'antan. Le plaisir quand vous étiez un jeune bambin avec de la morve au nez, de lancer un jeu des mois après avoir harcelé vos parents pour qu'il vous l'achète. SIGNALIS a pu me faire ressentir ça de nouveau, et à me toucher au plus profond de mon âme.
Beaucoup d'entre vous seront, j'imagine, rebutés par certains aspects du jeu, mais trouvez la force en vous de ne pas vous laisser bloquer par vos aprioris, car alors peut-être que comme moi, l'histoire d'Elster et Ariane vous fera ressentir des émotions que le jeu vidéo mainstream moderne ne semble plus réussir à convoquer.
Ce jeu, c'est le Beau.

Si comme moi, vous avez grandi avec The Walking Dead et des films de zombies, vous avez sûrement à un moment donné discuté avec vos amis de ce que vous feriez en cas d'apocalypse zombie, après avoir acheté le guide de survie en territoire zombie de Max Brooks en bon petit geek que vous êtes. "J'irais sûrement dans la maison de mon grand-père, il habite en campagne, y aura moins de zombies, en plus je pourrais planter des légumes, il a un fusil de chasse..." et d'autres phrases du genre en vous imaginant survivant de l'apocalypse ultime, tuant des zombies par pelletées comme un super guerrier.
Et donc, vous achetez Project Zomboid en vous disant "chouette, un jeu de survie de zombie, je vais pouvoir faire comme si ça arrivait pour de vrai". Vous lancez une partie en solo, confiant que vous allez pouvoir reconquérir Knox County des mains des morts-vivants les doigts dans le nez. Et la, vous voyez 6 mots, 6 mots que vous allez voir, et revoir, et rerevoir encore et toujours jusqu'à plus soif "Voici le récit de votre mort"
Parce que oui, Project Zomboid vous met donc dans la peau du seul humain non-infecté dans un Kentucky des années 80, avec comme seul objectif de survivre le plus longtemps possible, avant que la mort, inéluctable, ne vous attrape. Et donc, comme dans une vrai apocalypse zombie, vous allez devoir faire face aux hordes de morts vivants inarrêtables, infatigables, dont la moindre morsure est fatal, mais aussi et surtout au manque d'eau, aux coupures de courant, à la famine après avoir fini votre dernière boîte de conserve, à la fatigue après avoir combattu 3 pauvres zombies et vous êtes rendu compte que fracasser le crane de quelqu'un, même mort, demande beaucoup d'énergie, à la paranoïa au moindre coup de feu qui risquerait de rameuter une meute de zombie sur votre maison ou vous vous êtes réfugiés, a devoir traiter vos plants avec du fongicide pour éviter que le mildiou ne détruisent vos récoltes.
Vous allez vous rendre compte que le froid est une vrai menace auquel vous allez devoir vous préparer en avance, que l'eau de pluie est impropre à la consommation et risque de vous filer plus qu'une simple dysenterie, que manipuler une arme a feu correctement est un luxe dont peu de personnes disposent, que si vous ne consommez pas assez de bêta-bloquants, votre seul arme contre les zombies sera une crise de panique qui vous fera viser aussi bien que quand vous allez pisser après 12 shots de tequila.
Project Zomboid vous fera surtout vous rendre compte d'une chose simple : vous n'êtes pas un héros, vous n'êtes pas Daryl Dixon avec son plot armor en adamantium, vous n'êtes pas le nouveau Jésus qui guidera les autres dans les ténèbres, vous êtes juste un quidam qui, peu importe à quel point il se sera préparé, mourra à cause d'une simple erreur d'innatention, d'un manque d'endurance à cause de son obésité morbide, d'une crise de claustrophobie qui vous aura fait sortir au mauvais moment de votre refuge, d'un oubli ou d'un excès de confiance après avoir tué votre première centaine de zombies
Vous n'êtes pas le personnage principal, vous êtes le zombie qui se fait tuer en arrière-plan et dont le nom dans le générique est "Zombie #5421"
C'est la fin des temps, il n'y avait aucun espoir de survie, voici le récit de votre mort